Vers l’écolieu, pour une solidarité forte et des alternatives concrètes

Vers l’écolieu rassemble une cinquantaine de membres entre 20 et 75 ans qui ont envie de quitter l’île de France pour créer une vie qui leur correspond mieux, probablement un peu plus au vert, tout en gagnant en vie sociale.

 

On nous a parlé des colocs entre étudiants et étudiantes, de l’habitat partagé entre trentenaires ou des résidences senioriales pour ne plus vieillir seuls. Des habitants et habitantes d’île de France qui ne souhaitaient plus vivre les unes et les uns à côté des autres sans solidarité ni convivialité ont décidé de se retrousser les manches. Leur association, “Vers l’écolieu”, propose un défi : permettre de recréer du lien, une solidarité forte et la mise en place d’alternatives économiques, écologiques, sociales et alimentaires… sans apporter de contraintes !

 

logo-rvbComment ? En emménageant ensemble dans un même voisinage (l’écolieu), mais sans s’imposer un seul projet commun : chacune et chacun pourra porter ses propres projets associatifs, au sein de l’écolieu, et recevoir la solidarité et la participation des autres, selon leur intérêt. Ainsi, l’écolieu n’est pas un terrain borné, mais plus un voisinage où une diversité de projets collaboratifs germeront et seront portés par les membres mobilisés depuis l’Ile de France par l’association ou qui étaient déjà sur place.

 

Pour donner quelques exemples : imaginons que certains membres se rassemblent en coloc en ville, d’autres dans un immeuble avec buanderie, salon ou chambre d’amis partagée, d’autres encore dans un petit hameau un peu plus éloigné et d’autres, bien sûr, dans leur propre maison.

 

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La simplicité et la diversité des systèmes associatifs Leur idée principale ?

Utiliser le plus possible le format de l’associativité. Chaque projet, qu’il s’agisse d’un jardin partagé, d’une colocation ou d’une structure de partage du travail est indépendant. Chaque personne peut choisir ce qui l’intéresse et n’est jamais contrainte de participer à quelque chose qui ne lui correspondrait pas. Vous souhaitez avoir votre chez vous, mais aussi l’occasion de partager des repas dans une grande salle le dimanche ou d’avoir un jardin partagé ? Il vous suffit alors de gérer seul votre habitat et d’adhérer aux associations qui gèrent les repas conviviaux et le jardin partagé. Vous souhaitez vivre en ville mais participer à d’autres projets collaboratifs ? Vers l’écolieu s’installera en bordure de ville pour permettre à chacun de choisir son habitat idéal, partagé ou indépendant, urbain ou rural.Un projet social complet, mais à la carte Outre l’idée agréable de pouvoir participer librement à des projets collaboratifs et se rapprocher de la nature, Vers l’écolieu porte aussi un projet social.

L’idée, c’est que les comportements individualistes créent un cercle vicieux. Certains profitent de ce qui est apporté par le collectif, sans donner en retour. Si les gens sont anonymes et ne se connaissent pas, ces comportements profiteurs ne sont pas détectés et réprimés (ils peuvent même devenir acceptés ou encouragés, dans une société libérale). Celles et ceux qui ont adopté un comportement altruiste se sentent (à juste titre) floués, découragés. Tout le monde se méfie de tout le monde, et les comportements altruistes sont de plus en plus difficiles à soutenir. Toute la société est dégradée par ce cercle vicieux et même les individualistes y perdent, ne pouvant plus profiter de la mutualisation.

Au contraire, si on initie un climat altruiste, cela crée un cercle vertueux. Les gens se connaissent, se font confiance. Ils s’entraident, voient que d’autre personnes sont là pour les aider en cas de besoin et en viennent à faire -par défaut, naturellement- confiance à l’inconnu. La mutualisation de structures ou de services entraîne des bénéfices pour tous et même les individualistes gagnent à adopter un comportement altruiste pour pouvoir être autorisés à faire partie de chaque association et tirer avantage de ce vivre ensemble.

Les personnes à l’origine de Vers l’écolieu souhaitent proposer un modèle pouvant convenir aux ambitions altruistes, équitables, autonomes et écologiques des participants. Mais pour être efficace et se diffuser, ce modèle se doit de donner envie, de montrer qu’il est facile à adopter, petit à petit, sans demander nécessairement de rupture avec la société. Et c’est pour ça que la convivialité et l’ouverture sont pour notre association des mots d’ordre , mais aussi des moyens de maximiser l’impact social.

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Pourquoi faut-il changer le modèle “écovillage” ?

A l’origine, c’était l’idée de 4 trentenaires (Frédéric, Docteur en Chimie; Maeli, art-thérapeuthe; Cécile, archéologue et Pierre, Community manager) de partir au vert hors de Paris, sans s’isoler et en conservant tout ce que peuvent offrir les associations parisiennes. Il fallait donc pouvoir mobiliser assez de personnes motivées pour construire un “pôle associatif” sur un territoire peu urbanisé. Pourquoi ne pas penser à l’écovillage ? Ces communautés qui ont fleuri dans la France post 68 et reviennent sur la scène médiatique sur fond de crise écologique, de perte de lien social et de mouvements facilitateurs tels que Colibri ou le réseau Topia.

Pour Frédéric, beaucoup de communautés 68 ont voulu tout rejeter en bloc sans s’y être préparé. Leurs membres sont sortis des universités pour s’improviser agriculteurs et agricultrices, ont plongé dans l’amour libre sans avoir travaillé sur leur jalousie, se sont obligés à tout partager sans assez bien définir les limites entre l’intimité et le collectif, se sont jetés dans l’entreprise commune et l’habitat participatif sans penser aux risques et frustrations de tout partager. C’était l’idéalisme, le rêve, la passion… comme des histoires d’amour, mais entre amis. Et comme les histoires d’amours, ça finit mal, en général. Mais ces réussites et ces échecs passés sont aussi des enseignements pour les nouveaux projets collectifs, qui se remettent à fleurir depuis les années 90. Hors de question de commettre encore les mêmes erreurs – mais s’inspirer de leurs rêves et construire mieux, oui ! D’ailleurs l’association Vers l’écolieu comprend quelques membres qui avaient déjà tenté l’expérience collective dans les années 70 !

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Un nouveau rapport à des problématiques bien actuelles

Le rapport au collectif :

Chaque membre définit sans contrainte sa limite entre l’intime et le collectif. Personne n’est tenu de partager un terrain, un bâtiment ou un temps convivial si ce n’est pas son souhait. Ça n’empêchera pas de partager d’autres structures (une piscine naturelle ?) ou d’autres temps conviviaux (une séance de yoga ou de chorale ?).

Vie rurale ou urbaine ?

Quand la majorité des communautés post 68 visaient la vie rurale, Vers l’écolieu cible le périurbain. C’est d’abord dans une volonté de s’adapter aux attentes de ceux qui veulent vivre à la campagne, comme de ceux qui veulent vivre en centre ville… tout en permettant aux uns et aux autres de rejoindre les installations collectives en 2 ou 3 km de vélo.

L’emploi

Les communautés rurales se trouvaient souvent obligées de fonder leur propre entreprise communautaire pour subvenir à leurs besoins. Celle-ci était souvent agricole, et toute la communauté dépendait d’une seule entreprise, qui par dessus le marché employait des novices. La proximité de la ville est aussi un atout majeur pour l’indépendance financière et la recherche d’emploi !

Ecologie

Si les problématiques écologiques existaient dans les années 70, le doublement de la population mondiale, la disparition de 50% des forêts tropicales ou encore le réchauffement climatique ont depuis mis ce problème au cœur de nombreux projets d’écovillages. Ainsi, il est difficile de prétendre faire attention à la nature quand on conduit des dizaines de kilomètres par jour pour aller travailler ou quand on on consomme des produits animaux à chaque repas.

L’association Vers l’écolieu essaye donc de minimiser l’usage de la voiture en étant proche des sources d’emploi ou des services. Les transports doux comme le vélo électrique sont favorisés par un atelier associatif de réparation (l’Heureux Cyclage) et le partage de vélos de villes ou tandems entre voisins. Côté alimentation, l’association avec un maraîcher (via une AMAP) permettra d’avoir une alimentation végétale bio à bon prix et en circuit court. Les potagers partagés pourront également lier plaisir de jardiner et petites économies. Nous sommes passés de la communauté rurale des années 70 à l’écovillage.

Féminisme et inclusion

Si les luttes féministes des années 70 ont permis de remettre en question de nombreuses inégalités qui étaient jusqu’alors généralement perçues comme le fruit de la nature, la compréhension et la mise en application consciente du slogan “le privé est politique” est encore loin d’être la règle/de faire l’unanimité. Les communautés issues du mouvement de Mai 68 n’ont malheureusement pas été épargnées par la reproduction de certaines formes d’oppression sexiste, de la division inégalitaire du travail domestique ou aux violences sexuelles et conjugales en passant par la confiscation de la parole. Si le travail politique effectué tant sur le terrain du militantisme que sur celui des sciences sociales au cours des dernières décennies a permis de faire évoluer les mentalités, force est de constater que nous sommes encore loin d’une égalité de fait. Les membres de Vers l’écolieu ont bien conscience de l’ancrage et de la banalisation de ces comportements oppressifs dans notre société, c’est pourquoi nous souhaitons mettre en place des outils de vigilance et de transformation permettant d’avancer ensemble vers une société plus équitable et inclusive.

Rapport à l’intergénérationnel

Une autre différence fondamentale par rapport aux communautés de vingtenaires qui partaient s’installer ensemble en 70. Quelques communautés formées à l’époque voient maintenant tous leurs membres atteindre ensemble le 3ème âge et devoir faire appel à des aides extérieures pour ce qui ne peut plus être réalisé aussi facilement qu’il y a 45 ans.

A Vers l’écolieu, l’intergénérationnel est recherchée activement. Si la valeur n’attend pas le nombre des années, il y a des qualités comme la patience ou la mesure qui ont tendance à se développer avec le temps. Au contraire, la vigueur et l’enthousiasme sont des qualités plus fréquentes chez les plus jeunes. Chaque tranche d’âge a à profiter et s’enrichir de la différence de l’âge par la transmission de savoirs, l’ouverture à d’autres façons de penser et d’autres références culturelles.

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L’ouverture et l’équité comme mots d’ordres

Le groupe se veut le plus ouvert possible. Il n’y a pas de prérequis autre que l’envie de se reconnaître dans les objectifs affichés d’avancer vers une société plus altruiste, équitable et conviviale. Tant qu’il ne va pas à l’encontre de ces valeurs, n’importe quel projet peut être porté au sein de l’association :

● des projets professionnels (centre d’accueil pour personnes semi-dépendantes, une
agence web à fonctionnement horizontal…)
● habitat (coloc’ d’appart, cohabitat, écovillage…),
● associatifs (AMAP, bourse du travail, atelier vélo, recyclerie…),
● militants (féministe, défense des animaux, protection de l’environnement, éducatif…)
● ou tout simplement des projets conviviaux (jardins partagés, repas, yoga…).

« Vers l’écolieu » organise régulièrement des rencontres sur Paris pour favoriser l’intégration de nouvelles personnes dans le groupe, que ce soit juste pour découvrir les concepts portés par l’association, pour partager leurs propres projets ou pour adhérer à ceux déjà existants.

Les rencontres peuvent se faire à travers une balade en forêt, autour d’un repas partagé, à des conférences ou des discussions thématiques organisées par l’association ou encore par internet avec des émissions interactives avec les membres les plus actifs du groupe.

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Source : http://4emesinge.com/vers-lecolieu-pour-une-solidarite-forte-et-des-alternatives-concretes